Les réunions publiques organisées par l’équipe « Aires de Rien » donnent un aperçu concret de la démarche qu’elle propose. Le groupe de travail a ainsi présenté, le 4 mai, l’état de sa réflexion à propos de cinq des sites identifiés comme des « délaissés » qui peuvent être intéressants à valoriser. Leurs propositions prennent en compte la topographie, les contraintes, la réglementation mais reflètent aussi les attentes de la population qui fait partie du périmètre concerné (CQ 8).
C’est donc avec les habitants que s’ouvre le dialogue, pour confronter les projets en question. Et l’on observe qu’ils ont des choses à dire car ils connaissent bien ces lieux où ils vivent maintenant mais aussi ils savent souvent comment c’était hier. Ils remarquent que parfois c’était mieux alors (prolongement de la rue Donmrémy, pavage de la place Jeanne d’Arc…). Ils ont des idées sur ce qu’on peut améliorer : telle placette par exemple peut être végétalisée mais ça ne suffira pas à compenser les inconvénients de l’acoustique (effet de résonnance). A la place des potelets disgrâcieux qui servent à interdire le stationnement, ils proposent des bacs à fleur qui auront le même effet dissuasif, mais plus joliment. Les projets peuvent aussi varier dans le temps : la passerelle Charcot, devant le MK2, est provisoire, mais rien n’empêche d’y prévoir des installations temporaires et là les suggestions abondent : patinoire, marché de Noël, jardins partagés… Ils souhaitent, en tout cas, que ça reste un lieu de vie comme ça l’est actuellement pour les jeunes qui l’investissent.
Chacun peut donc s’exprimer et être entendu. Tout n’est pas faisable, les attentes sont diverses, contradictoires, mais il y a débat. Les membres du groupe de travail sont à l’écoute mais ils ne sont pas les seuls. La représentante de la mairie du 13e s’est dite intéressée par cette remontée des opinions de l’usager mais elle en pose les limites : c’est à propos de la place Jeanne d’Arc. Ne s’agit-il pas ici d’un projet d’aménagement urbain qui va au-delà du projet aires de rien? On lui répond que ce projet se veut modeste, qu’il ne prévoit que des « préconisations », c’est-à-dire des suggestions, et cela sur une surface bien délimitée (autour de l’Eglise). Néanmoins, cet apport des usagers, aussi limité qu’il soit, peut permettre d’affiner la réflexion sur une reconfiguration de toute la place. Végétaliser l’espace « délaissé », y installer des bancs pourraient ajouter à l’attractivité des lieux, et contribuer ainsi à l’élaboration d’un projet plus global. Et puis, n’est-il pas intéressant de prendre en compte le regard de ceux qui y vivent et qui déplorent que la magnifique vue que l’on a de leur place vers le Panthéon soit malheureusement limitée par des panneaux de signalisation et des feux de circulation ? C’est en vivant sur place qu’on sait ces choses-là.
Et puis ces échanges peuvent déboucher sur des avantages collatéraux : une habitante propose que l’un des derniers cafés de la place Jeanne d’Arc, qui est à louer, soit repris collectivement pour y perpétuer l’esprit de convivialité de tradition dans le quartier.
Cette construction collective se fait lentement mais sûrement.
Mais restent quelques questions :
– Ceux qui viennent peuvent s’exprimer et être écoutés. Mais qu’en est-il de ce que pensent ceux qui ne viennent pas ?
– Apprivoiser les vides c’est bien, mais il ne faut pas oublier le charme des terrains « vagues », lieux de spontanéité et de création.