Nous vous proposons de déposer sur notre blog les idées que vous avez envie de partager, sur notre vie pendant le confinement, et surtout, vos propositions sur la vie après, dont nous pensons qu’elle ne peut pas être le simple retour à la situation antérieure.

Dans le prolongement de notre réflexion sur le 13e arrondissement et son devenir.

Panneau d’exposition | Une histoire parisienne de la démocratie participative

Panneau d’exposition | Une histoire parisienne de la démocratie participative

Street art ou peinture murale ?

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Conor Harrington, Étreinte et lutte, 85 bd Vincent-Auriol

Pourquoi peindre sur des murs « aveugles » ? Ou sur des surfaces extérieures aux habitations ? Que peindre, que représenter ? Il y eut des scènes religieuses en Italie, représentant par exemple une annonciation ou des personnages voulant apparaître comme des passants de la rue, des anonymes qui demandent à être reconnus comme des humains aux États-Unis, ou des manifestants qui annoncent une lutte au Mexique. Dans ces trois pays on a vu des mises en scène d’un groupe plus ou moins rassemblé autour d’un chef : ce fut le cas dans  des régions dites de l’Est pendant la guerre froide. Ou c’est la célébration du chef de l’État : je pense à la Chine, à la Corée du Nord…

À Paris, rien de cela. Quelques scènes plus ou moins légères, qui venaient recouvrir un mur « libéré » par la destruction d’habitations adjacentes, il y a trente ou quarante ans … (rue Clisson) ou quelques peintures « sauvages » éphémères dans des quartiers appelés à être réaménagés… Et, depuis quelques temps, une prolifération d’images surfaces apparaissent sur des murs d’immeubles publics,  souvent non prévus à cet effet par les architectes. Voire même une densification tendant à saturation dans le quartier du boulevard Vincent-Auriol.

Ces productions interrogent sur la « qualité artistique » d’elles-mêmes, c’est-à-dire sur leur place dans la ville et sur leur iconicité. Si l’on considère qu’une ville doit respirer comme une musique donnant des sons qui ont un sens par rapport à des silences, comme une peinture de chevalet  qui joue sur les pleins et les vides, ne faut-il pas s’interroger sur la densité visuelle qui impose un trop grand nombre de peintures, d’autant plus que l’espace vide au sol est de faible dimension ?

Une deuxième question s’impose aussi, concernant l’iconographie de la plupart de ces peintures, de ces objets. Jean Baudrillard écrit dans Le Système des objets : « derrière chaque objet réel, il y a un objet rêvé, écrit ». Pourquoi s’agit-il souvent d’immenses portraits, immenses par rapport à la taille des habitants, des passants ? Un habitant, très connaisseur des pays de l’Est et des « dictatures » d’Asie me disait qu’il n’y a que dans ces pays que l’on impose des images gigantesques aux citoyens. Sans reprendre complètement cette opinion, je pense que la taille des figures humaines a du sens par rapport aux Parisiens. Alors, quel rêve ? Quel sens ? Est-ce le symbole d’un pouvoir qui se voudrait plus grand ou la décoration-collection d’un magasin trop fourni ?

Jean-François Einhorn

Le point de vue d’une habitante du treizième sur le street art

Mon avis : il est dubitatif. Quel est l’intérêt de décorer un pan de mur qui a été pensé nu par un architecte compétent ? L’effet géométrique dans l’espace de ces grands pans de mur est complètement perdu ; je ne vois pas. Autant je suis favorable à des œuvres cache-misère sur des pans de mur abandonnés et disgraciés (pignons pas conçus pour être vus ou panneaux-caches de chantier), autant je suis défavorable à ces “œuvres”.  La surface qu’elles occupent les rend beaucoup plus agressives que la moindre publicité sur panneaux ou abribus. Une fois ça va ; tous les jours, bonjour les dégâts.

Par exemple, je vais assez souvent sur la placette près du métro Nationale et je suis lassée d’y voir le visage exagérément agrandi de Pinel. Il n’est pas photogénique et de plus, rien dans sa physionomie ne rappelle le rôle qu’il a pu jouer dans la vie et dans son siècle. Quant au visage de femme qui lui fait pendant : qui est ce ? que fait-elle là ? Est-elle sensée être une “aliénée” qui a bénéficié de ses soins ?

Jorge Rodriguez-Gerada – place Philippe Pinel – Paris 13

Bien qu’élevée dans l’admiration des murs dénudés des églises romanes – de mise dans les années ’40 et ’50, je ne suis pas pour l’imposer à nos contemporains ni à notre environnement. Au contraire, les photos des murs très colorés par des publicités murales au XIXème siècle me plaisent bien (voir en bas de la rue Mouffetard) et je garde un excellent souvenir des pignons parisiens de mon enfance, couverts de réclames peintes pour des produits de beauté, cirages ou autres disparus. J’aime en retrouver un au hasard, un peu effacé mais encore reconnaissable comme celui de l’avenue des Gobelins. J’y préférais toutefois les affiches ; elles présentaient l’avantage de changer souvent (Ah ! la campagne Garap, ah ! les « ronds rouges” annonçant la campagne pour Total).

Alors une fresque qui présente démesurément agrandie, une sorte d’héroïne de bande dessinée vaguement fantastique – dont on ne connaît pas l’histoire – pourquoi faire ? Un profil de chat bleu, copie exacte d’une fresque qui orne déjà une ville tunisienne (qui a copié ?), pourquoi ?

(Texte écrit en juillet 2017)

Street Art : le point de vue d’un plasticien

DSC01639Sous le boulevard du Général Jean Simon

L’art qui invente, néologisme, choque. Toujours, en Occident. Rappelons-nous l’Olympia d’Édouard Manet (1865), Impressions soleil levant de Claude Monet (1872). Les « barbouilleurs » disaient les défenseurs de l’art officiel. Les artistes fauves étaient comparés à des « sauvages ». Le cubisme, contre le point de vue unique. Le dadaïsme comme  refus des valeurs de société dont le moteur est la guerre…

Le Street Art ? : « l’épuisement des possibles sociétaux, la disparition des opportunités classiques d’épanouissement » écrit Codex Urbanus (2018). Une expression de minorités délaissées, en Amérique à l’origine. Alors, ce qu’on voit sur les murs des propriétés de la Ville de Paris, c’est un travail officiel, académique. Ce n’est pas en peignant en grand à l’extérieur, et parce que les techniques industrielles le permettent aujourd’hui, que l’on pourra parler d’art.

La récupération des inventions artistiques par les pouvoirs, quels qu’ils soient, qui veulent « faire jeune », épuise le sens de l’art. Ce n’est plus de l’art. C’est devenu trop souvent un vernis pour des pouvoirs  qui ne sont plus mus par les inventions nécessaires à la vie de société.

Codex Urbanus écrit : « le street art ne peut exister qu’illégalement » dans Pourquoi l’art est dans la rue ?, Grenoble, critères éditions, 2018.

François Moulin, avril 2018

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Sur le boulevard du Général Jean Simon

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Rue Barrault

 

Des tours, Paris prend garde !

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Avant-propos : il est question ici de tours, c’est-à-dire de constructions en hauteur. Il  ne sera fait aucune distinction entre tours et IGH, la seule chose qui importe est la relation d’échelle. Ainsi, on mettrait sur le même plan une tour de 100 mètres dans un champ de colza et un IGH émergeant des toits d’une ville moyenne. Juger si c’est acceptable est une autre question…


37, un nombre d’or ?

Sur Paris, c’est actuellement la hauteur maximum autorisée par le PLU pour les constructions. Ceci sauf pour les zones de plafond élevé, précisées sur le Plan des Hauteurs.Je me suis livré à un petit exercice de nivellement très élémentaire sur le relief du site parisien. Le cœur de Paris, symbolisé par le niveau de Notre-Dame émarge à la cote 35 NGF. Tandis que le point le plus haut, sur la Butte Montmartre, émerge à la cote 125 NGF. Ces valeurs sont arrondies, ce sont les  cotes naturelles du site et leur moyenne géométrique est à 90 NGF.  Cette hauteur, exprimée en mètres, suggèrerait que la bonne hauteur moyenne pour construire des immeubles, respectueux du relief, se situerait autour de 45 mètres. Soit environ  2 étages de plus que le plafond ultime  autorisé. Ça ne prouve rien, mais c’est troublant.

Deux autres paramètres ne doivent rien au hasard. Entre R+6 et R+12, c’est- à dire en gros entre 21 et 37 m se situe une limite très humaine qui est celle de la montée sans ascenseur. Haussmann l’avait parfaitement appréhendée, pour le petit peuple des mansardes. Enfin, une coupe en travers d’une avenue parisienne démontre, sans commentaire, qu’on se situe ainsi à l’échelle de l’arbre.  Euclide a mis du temps pour affiner son  nombre d’or, les bâtisseurs de Paris auraient-t-ils au fil du temps trouvé le leur?  De cette nappe de toits émergent les plus beaux monuments parisiens, ce qui fait sens. Pourquoi perturber cet équilibre historique, pour quels enjeux ?

Une brève histoire des tours.

L’archétype est Manhattan puissant et superbe bouquets d’IGH. Pour un urbaniste, donc pour moi, c’est le symbole d’un urbanisme pionnier : une armature urbaine de type « grille-pain », orthogonale, sur laquelle on a greffé de hautes tours plus ou moins enchevêtrées, ordonnées par une « skyline », figure de style assez floue… Ce modèle basique est efficace.  Il l’est surtout parce qu’il exprime la puissance et constitue une formidable vitrine urbaine, exposée aux yeux du monde.

Ce modèle a inspiré La Défense dans les années soixante. Il exprime à plus petite échelle la même chose, la volonté d’afficher le renouveau de l’économie, avec l’État aux manettes. Ce fut  une vraie réussite, mais on oublie que s’exposeront  ainsi, face à Paris, les futures multinationales qui donneront leur identité aux tours. Elles auront  pour nom, Elf, le Crédit Lyonnais, le GAN, la Générale des Eaux… qui n’hésiteront pas à y  construire leur siège. Ce modèle-vitrine se perpétuera dès l’ouverture du périphérique. Il prendra une forme plus ouverte aux innovations  formelles, avec de grands noms de l’architecture, en Front de Seine. La sombre stèle de Montparnasse sera un accident de l’histoire…

Juste un mot sur une opération qui a marqué le paysage du Treizième, les Olympiades. Elle vient de fêter ses quarante ans. Elle est à peu près contemporaine des villes nouvelles, avec un fort parti de typo-morphologie urbaine caractérisée par le souci de bâtir sur dalle isolée de la circulation automobile. Les tours de 100 mètres habitées rétablissent une densité décente, elles offrent des appartements vastes et de qualité, à condition de pouvoir payer les charges. Quels que soient les atouts de ce modèle urbain, sophistiqué et multifonctionnel, sa survie pose d’énormes problèmes. Seule la ville nouvelle d’Evry a osé timidement le casser pour finalement tenter de s’adapter.

 Ce qui ressort ce bref tour d’horizon c’est que pour un urbaniste la tour, qu’elle soit occupée ou habitée, est une composante urbaine et une solution architecturale difficile à manier. Parce que fonctionnellement et morphologiquement c’est un « silo », d’une mixité factice, qui ne s’impose que dans des contextes précis et raisonnés (extensions pionnières, quartiers d’affaires, urbanisme de dalles…). Qui n’ont pas tous le même intérêt…

Une histoire de pyramide 

Le marché du tertiaire, qui nourrit pour l’essentiel les modèles de surdensité, autrement dit les tours, a depuis quelque temps des caractéristiques dynamiques de fonctionnement analogues à la célèbre pyramide de Ponzi. L’original est un mode de « gestion » frauduleux d’actifs financiers dans lequel les derniers arrivants dans le fonds d’investissement financent les revenus d’épargne, totalement fictifs, de l’ensemble des porteurs de titres. Le montage s’écroule lorsque la collecte est insuffisante pour rémunérer tout le monde, les actifs s’étant évaporés entretemps. Le système s’alimente par le haut et s’effrite par le bas.

Le marché de l’immobilier d’entreprise, lui  parfaitement légal, fonctionne sur l’agglomération  parisienne sur le même schéma. Le parc de bureaux en blanc livré chaque année (autour d’un million  de m² par an) alimente le marché par le haut et déclasse le parc  plus ancien, souvent intimement intégré dans le tissu urbain. Celui-ci ne s’écroule pas vraiment mais il ne lutte pas à armes égales : pas assez câblé, pas assez modulable, souvent enclavé et moins bien situé sur les nœuds d’infrastructures…Dans ce contexte, construire des tours de bureaux sur Paris, qui bénéficie d’un fort effet d’aubaine, c’est accroître ce déséquilibre concurrentiel. Le vrai gisement d’emplois d’avenir vit bien la mixité de la trame ancienne, en constante mutation. Est-ce encore  une cible prioritaire ? Alors pourquoi Paris, qui mise intelligemment sur son image de capitale des incubateurs de start-ups et autres fablabs, symboles de la nouvelle économie (décentralisée, collaborative, fertilisante), accepterait-elle ces encombrants édifices qui n’incarnent même plus le progrès ?

Il y a plus grave, ce « marché du lourd » qu’on le veuille ou non va s’éclater dans les quinze prochaines années sur les interconnexions du Grand Paris Express, c’est déjà en cours. Et la marée tertiaire risque de refluer vers la périphérie, ce serait par parenthèse  le signe d’un rééquilibrage bienvenu du taux d’emploi… Hors La Défense, intimement liée à Paris, les tours intra-muros resteront-elles dans le marché devenu très fluide ? J’en doute fort personnellement et, en tant qu’urbaniste, je déconseillerai d’en prendre le risque.

La vraie nature des tours

Les tours de bureaux, avant d’être des éléments architecturaux sont des produits financiers, comme les autres. En  moins risqué que les produits de taux et à beaucoup moins long terme qu’on l’imagine. Le trio promoteur / investisseur / architecte est à la manœuvre. Certes, au départ il faut du foncier, mais l’aménageur, généralement une SEM, n’est pas forcément partisan de ce genre de forme urbaine. Cependant, elle peut lui sauver la mise dans des « queues de programme » ou dans des sites scabreux où la commercialisation des sols viabilisés n’offre pas trop d’opportunités. Les tours défient l’environnement, elles sont sourdes, inertes et climatisées. Si on oublie le paysage le problème majeur est en pied d’immeuble, l’idéal est de l’ancrer dans une dalle. Vieille recette !

 Mais c’est le trio qui y trouve le meilleur compte. Le promoteur, généralement spécialisé n’a par définition pas d’état d’âme sur la localisation des édifices, hors leur désenclavement. De toute façon il ne finalisera son montage que lorsqu’il aura pré-commercialisé la plupart des mètres carrés. L’investisseur, s’il est chinois, hésitera peut-être entre 30 hectares de grand cru et un produit immobilier. Si c’est un fonds de pension ou un institutionnel, il n’hésitera pas une seconde : Paris est une marque, le produit est du solide et il sort de terre en trois ans après la signature. Les entreprises  qui ont maintenant des stratégies immobilières, gérées comme des actifs, se mettent également sur le marché immobilier, devenu de plus en plus spéculatif.

Quant à l’architecte, généralement de renom, il y voit la meilleure expression de son art de construire, souvent avec une image en tête. Le problème de l’intégration de son architecture dans l’environnement est toujours soluble puisque, d’une certaine manière, il ne s’adapte pas au contexte, il le recrée. Si on lui demande de concevoir une tour écologique, il fera appel à l’ingénierie nécessaire pour verdir son projet. Celui-ci armé d’une BIM factory pourra facilement simuler les adaptations formelles – échancrures, écrêtements partiels, torsion – des édifices, permettant d’y intégrer du végétal. Les données numériques traduiront une faible diminution de l’empreinte carbone, mais le résultat sera visible. D’autant que la visualisation en 3D sera irrésistible, dans une lumière irréelle.

La démarche de l’architecte, dernier maillon de la chaine, n’est absolument pas critiquable, sauf s’il projette trop haut son ego ; il est dans son rôle et l’art de construire a esthétiquement évolué. Mais c’est aux décideurs de résister quand il le faut à l’attrait des totems siglés. Paris peut tenir son rang sans ces artefacts. Le fond du problème réside dans la tentation perpétuelle d’adapter le droit des sols, déjà  permissif. En urbanisme, il faut toujours faire des choix et garder un cap fort et clair.

Je conclurai brièvement, il n’est pas utile d’en rajouter. Les tours ne sont pas à leur place à Paris, par respect pour le contexte environnemental et parce qu’elles ne font plus sens. J’ai l’intuition que la majorité des Parisiens partagent cet avis et ont une autre perception de la modernité. Ça mériterait qu’on le vérifie.


Postface : une mise au point s’impose. Pour un urbaniste être contre les tours en tant que forme urbaine, donc composante de la ville, serait une sottise. L’avenir des tours, si j’ose dire, est radieux. Il suffit de penser à l’Afrique, qui va doubler sa population en trente ans, probablement tripler le nombre d’urbains. J’ai initié en leur temps des extensions urbaines d’Abidjan, il y a des tours.

Emmanuel LEGUY, Urbaniste Environnementaliste

20 février 2018

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Impressions de Bruneseau nord

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Nous partons de la maison des projets de la Semapa, quai Panhard et Levassor et passons sous le pont national. Sur le quai d’Ivry, une station de service, des cimenteries, des entrepôts de matériaux bouchent la vue sur la Seine ; des camions bruyants s’activent. Un grand escalier descend du boulevard Jean Simon qui a été civilisé. Il annonce les immeubles d’habitation à venir jusqu’à la rue Jean-Baptiste Berlier et les premiers contreforts du périphérique : un immeuble en bois de logements privés, un immeuble de logements locatifs intermédiaires et deux résidences étudiantes.

De l’autre côté de la rue Berlier, nous entrons dans la zone de l’appel à projets. Toujours beaucoup de bruit. Vraiment peu d’espace entre la rue Berlier et les bretelles du périphérique. Mais l’immeuble à construire là protégera peut-être les logements et leur petit jardin des nuisances du périphérique.

Nous passons sous le périphérique. Du bruit toujours et des camions. On ne peut pas se parler sans élever la voix. Nous longeons une parcelle qui devra être aménagée en gardant les bâtiments existants : un immeuble des années 50 à l’architecture brutale et bien dessinée regardant vers la Seine et une résidence étudiante le long de la rue Bruneseau. Il ne reste plus grand-chose pour mettre les m² à programmer.

Il n’est pas possible de s’approcher du reste de la zone de l’appel à projets entre les bretelles du périphérique en construction et la rue Jean-Baptiste Berlier également en construction. Nous partons donc explorer l’environnement immédiat, la zone d’activités économiques d’Ivry par la rue François Mitterrand. Nous ne trouvons que des entrées de parkings pour Leroy Merlin, Baktor (qui arrête ses activités), un garage, de grands entrepôts de marchandises, le Syctom et de nombreux gros camions manœuvrent pour y entrer ou en sortir. Personne sur les trottoirs. Difficile de traverser la rue.

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Nous empruntons la rue Victor Hugo jusqu’au pont sur les voies ferrées. Belle vue sur les constructions industrielles et les haubans du périphériques mais l’autre rive nous paraît trop loin pour que nous franchisions les voies.

En reprenant la rue François Mitterrand de l’autre côté de la rue Victor Hugo nous rencontrons des piétons sur les trottoirs bordés maintenant d’habitations dont deux immeubles en construction pour loger les auto-entrepreneurs de la station F (halle Freyssinet). C’est l’heure de la sortie des écoles. Rue Jules Vanzuppe, nous longeons le centre commercial Grand Ciel. Nous continuons jusqu’au quai Marcel Boyer. Celui-ci a été civilisé : élargissement de la voie, terreplein central, requalification des bâtiments des activités sur la Seine qui laissent deviner le fleuve, limitation de la vitesse.

Nous remontons par la rue Bruneseau, constatons le démarrage des travaux sur la parcelle des tours Duo. Nous nous arrêtons rue J.A. de Baïf face à la percée sous la petite ceinture d’un premier tunnel duquel nous voyons le boulevard Jean Simon sous lequel un deuxième tunnel devra être creusé et nous pouvons imaginer qu’au-delà, ce seront le périphérique et ses bretelles qui seront percés de tunnels. L’allée Paris Ivry, la grande rue commerçante de Bruneseau nord, les empruntera tous et conduira à la zone d’activités économiques d’Ivry. Et alors la ZAC Paris Rive Gauche sera terminée.

Pourquoi détruire une zone de grande activité qui semble avoir sa raison d’être au bord du périphérique et de la Seine, en liaison avec Ivry ? Pourquoi ne pas la renforcer et en même temps, comme à Ivry, l’apaiser ?

Françoise Samain

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À la découverte du secteur Bruneseau Nord

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La maquette, exposée par la Semapa dans ses nouveaux locaux de la Maison des projets, apporte un plus par rapport aux plans, en donnant les volumes, en insérant le territoire de l’opération PRG dans son contexte, en mettant en évidence les infrastructures de transport et les liens avec le centre de Paris, avec le 12e, avec Ivry. Cependant, rien ne vaut une visite sur place  qui nous plonge en direct dans le contexte.

Côté Paris, on voit des ouvriers de chantier,  mais ni habitants ni promeneurs. Seuls d’énormes camions manœuvrent et les voitures circulant sur le quai donnent l’impression de vouloir s’éloigner au plus vite. On comprend pourquoi on n’a pas envie de venir dans ces lieux ingrats. On remarque  immédiatement que le site est enserré par la Seine, le périphérique et les rails de chemin de fer. Cette localisation explique qu’on trouve ici essentiellement des activités de logistique, indispensables, mais peu attirantes. On se demande comment implanter logements, commerces et équipements sur de telles parcelles, exposées au bruit et à la pollution. On  nous dit que les quatre tours prévues feront écran mais cette protection sera-t-elle suffisante ? Si le terrain prévu pour les tours Duo est conséquent, on se demande aussi comment on pourra caser  les autres tours sur des parcelles aussi exigües. Les conditions d’installation d’un nouveau quartier de ville ne semblent pas réunies.

Côté Ivry, c’est aussi un secteur d’activités avec des entrepôts, des magasins comme Truffaut et Leroy-Merlin, Baktor, les cinémas Pathé, l’hypermarché carrefour, le Syctom désormais bordé par les ciments Calcia. Ici aussi, les piétons ne sont pas très nombreux  car les clients des commerces locaux, les spectateurs des cinémas, ne viennent qu’occasionnellement, et en voiture pour la plupart. Si on pénètre un peu plus dans Ivry, on finit par trouver des logements mais ni commerces ni équipements de proximité. Il y a bien l’immeuble Niel, destiné à loger les usagers de la station F, mais on peut craindre que ceux-ci ne soient pas incités à s’insérer dans un quartier peu attractif. Ils voudront probablement rejoindre au plus vite le quartier Chevaleret, et  ce sera surtout en deux-roues car la desserte par les transports en commun est insuffisante : on est loin des bus et des métros et  le tramway, plus proche, ne propose pas un trajet qui leur permette d’aller au travail.

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Il est prévu d’améliorer les liens entre le sud 13e et sa banlieue, par le percement de l’allée Paris-Ivry. L’idée est séduisante mais qu’en sera-t-il réellement ? Le parcours devant se faire en passant sous le boulevard Jean Simon, puis sous les bretelles et les voies du périphérique, il est indispensable d’assurer une insonorisation et une sécurité  efficaces. Pour que ça marche, il faut que les gens aient envie d’y aller pour circuler mais aussi pour s’attarder. Il ne semble pas judicieux d’installer les commerces traditionnels (habillement, parfumerie) que l’on trouve à proximité, à Plein Ciel, ou à Bercy. On pourrait prévoir un marché, des jeux et activités pour les enfants et les jeunes, des lieux de loisir et de culture, des bistrots sympathiques… Au départ de l’allée, côté Paris, on est en plein en territoire étudiant à côté de l’École d’architecture,  à proximité de l’université Paris-Diderot et pas trop loin de l’Inalco-Bulac. On a un moment surnommé cette nouvelle voie « l’allée des étudiants » et cela pourrait inspirer le choix des activités à y installer. Pour que le lien soit efficace, il faudrait aussi que le débouché côté Ivry donne envie d’y aller voir et qu’il contribue à désenclaver le secteur Bruneseau.

Brigitte Einhorn

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L’œuvre de Le Corbusier inscrite au patimoine mondial de l’Unesco

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17 oeuvres de Le Corbusier, réparties dans 7 pays, témoignant d’un nouveau langage architectural ont été inscrites par l’Unesco au patrimoine mondial. Ils témoignent  d’une « recherche patiente » menée sur un demi-siècle.

Ces œuvres sont, dans l’ordre chronologique :

  • les maisons La Roche et Jeanneret (1923) à Paris,
  • une villa au bord du lac Léman (1923) à Corseaux (Suisse),
  • la Cité Frugès (1924) à Pessac (Gironde),
  • la maison Guiette (1926) à Anvers ,
  • les maisons de la Weissenhof-Siedlung (1927) à Stuttgart
  • la villa Savoye et la loge du jardinier (1928) à Poissy,
  • l’immeuble Clarté (1930) à Genève,
  • l’immeuble locatif de la porte Molitor (1931) à Boulogne-Billancourt ,
  • l’Unité d’habitation (1945) « cité radieuse », Marseille,
  • la Manufacture (1946) à Saint-Dié-des-Vosges ,
  • la maison du docteur Curutchet (1949) à La Plata (Argentine),
  • la chapelle Notre-Dame-du-Haut (1950) à Ronchamp
  • le Cabanon de Le Corbusier (1951) à Roquebrune-Cap-Martin
  • le complexe du Capitole (1952) à Chandigarh
  • le couvent Sainte-Marie-de-la-Tourette (1953) à Eveux (Rhône),
  • le Musée national des beaux-arts de l’Occident (1955) à Taito-Ku (Japon)
  • et la Maison de la culture (1953) à Firminy.

À noter que les œuvres du patrimoine du 13e n’y sont pas représentées

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Circulation automobile difficile à Croulebarbe

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La circulation des automobiles, des cycles et des piétons sera difficile dans le quartier Croulebarbe pendant plusieurs mois.

La mairie du 13e, avec l’appui de la RATP, d’Eau de Paris et en présence du directeur du cinéma UGC Gobelins a organisé une réunion à l’intention du CQ1 pour présenter les importants chantiers qui vont perturber les usagers et les riverains du boulevard Arago et de l’avenue des Gobelins pendant plusieurs mois à compter de cet automne. En voici un résumé.

Les travaux RATP boulevard Arago

Sans électricité, pas de métro ! Pour alimenter la traction (en 750 volts pour le métro et 1 500 volts pour le RER) ainsi que les stations, bâtiments et ateliers (en 400 volts), la RATP dispose d’un réseau indépendant de près de 2 000 kilomètres de câbles à haute tension qui sont pour l’essentiel enterrés sous la voirie. Ainsi un transformateur situé à Denfert Rochereau envoie du courant qui passe sous le boulevard Arago et le boulevard Saint Marcel et distribue de l’électricité à plusieurs lignes, notamment les 6 et 7, jusqu’au terminus de la ligne 11 Mairie des Lilas. Les câbles actuels ont plus de 50 ans et doivent être remplacés et prolongés pour atteindre Rosny-sous-Bois, nouveau terminus de la ligne 11 en 2022.

Du début du mois de septembre jusqu’à la fin du mois de décembre, le trottoir des numéros impairs du boulevard Arago sera ouvert puis refermé par tronçons de 200 mètres pour réaliser ces travaux. En 2017, ce sera le tour du boulevard Saint-Marcel, du côté du 5e arrondissement.

La circulation automobile et celle des piétons seront nécessairement perturbées, les cafés et restaurants devront démonter leurs terrasses.

Une piste cyclable boulevard Arago

C’est un engagement de la Ville dans le cadre du « plan vélos ». Depuis la Santé jusqu’au carrefour des Gobelins, l’espace réservé aux cyclistes sera, dans chaque sens, implanté sur la chaussée et non sur la voie cavalière, afin de laisser cet espace aux piétons. Les pistes, d’une largeur d’environ 1,5 mètre, seront protégées de la circulation automobile par un marquage au sol les séparant du stationnement des voitures. La place de l’automobile sera donc réduite d’environ deux mètres dans chaque sens. Le sujet le plus difficile à traiter est celui des arrêts de l’autobus 83 : des quais seront construits sur la chaussée et comprendront les abribus. Les voyageurs devront donc franchir la piste cyclable pour rejoindre l’arrêt.

Une bonne coordination entre la RATP et la Ville est indispensable pour que ces deux chantiers se fassent dans l’ordre et que cela n’aggrave pas les nuisances.

Le remplacement des conduites d’eau avenue des Gobelins

Eau de Paris va entreprendre à partir du mois de septembre un très important chantier de remplacement des conduites d’eau situées dans les égouts sous le trottoir des numéros pairs de l’avenue (donc côté Manufacture). Il s’agit de très gros tuyaux (40 centimètres de diamètre) qui transportent l’eau depuis le réservoir de Montsouris et alimentent les quartiers bas de la rive gauche : la fonte est ancienne, les points de jonction sont érodés et laissent passer quelques fuites, et la peinture qui a été utilisée contient de l’amiante. L’enlèvement et le remplacement des conduites se feront en trois tronçons, chacun d’entre eux nécessitant de creuser un puits de service pour le matériel et au moins un puits pour la sécurité des ouvriers. Les travaux dureront environ trois mois par tronçon et devraient s’achever au carrefour Gobelins Arago au mois de mai 2017. La « base vie » sera implantée rue Croulebarbe, en face de l’école maternelle

Eau de Paris nous a assuré qu’il n’y aurait pas de coupure de l’alimentation en eau des riverains (sauf ¼ d’heure en début et en fin de chantier du tronçon concerné). La circulation des piétons sera rendue plus difficile, celle des vélos (surtout dans le sens montant) plus périlleuse et les commerçants auront sans doute quelques bonnes raisons de se plaindre.

La démolition-reconstruction du cinéma UGC de l’avenue des Gobelins.

Presque un an et demi de travaux : le cinéma UGC de l’avenue des Gobelins va être entièrement démoli et reconstruit. Il n’est pas prévu d’augmentation significative du nombre de places, mais une augmentation du nombre de salles, qui passent de 7 à 11. Davantage de salles plus petites devrait permettre de programmer plus de films et d’enrayer la baisse de la fréquentation.

Le chantier s’annonce important, avec une noria de camions pour enlever les gravats, une réduction à deux voies de l’avenue, le couloir bus neutralisé et un parcours piétons un peu périlleux de ce côté de l’avenue

La coordination entre les travaux du cinéma et ceux du réseau d’eau s’annonce délicate.

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Réinventer Paris avenue d’Italie : un projet innovant

Le projet atelier d’architecture autogérée est dénommé Wiki Village Factory (WVF)

Le projet de l’atelier d’architecture autogérée est dénommé Wiki Village Factory (WVF)

La Ville de Paris a présélectionné trois projets pour chacun des 25 sites de l’opération Réinventer Paris. Rappelons qu’il s’agit de réaliser, sans dépense publique, des programmes « innovants » sur des terrains appartenant à la collectivité. Un jury international départagera prochainement les candidats encore en lice.

Compte tenu des conditions du concours, peu d’informations circulent. Mais Ada 13 a pu rencontrer le cabinet aaa (atelier d’architecture autogérée) qui a déposé une proposition pour l’avenue d’Italie, sur l’espace compris entre l’avenue et le centre commercial.

L’aaa se veut être une plate-forme collective d’exploration, d’action et de recherche autour des mutations urbaines et des pratiques culturelles, sociales et politiques émergentes de la ville contemporaine. Elle souhaite favoriser la participation des habitants à l’autogestion des espaces urbains délaissés, et contourner les stéréotypes par des projets réversibles.

Le projet de l’atelier d’architecture autogérée est dénommé Wiki Village Factory (WVF). Il est proposé en partenariat avec REI France, la Nef, étic, le groupe SOS, enercoop, biocoop, terre de liens, Jardins de Cocagne, Habitats Solidaires, le 6b, étamine, Oregon, Écodesign Fab Lab, Macogep, Canada et Massachusetts Institute of Technology (MIT), États-Unis. Il s’agit de réunir des organismes d’innovation sociale dans un bâtiment participatif et autogéré.

Les activités proposées sont l’agriculture urbaine, l’apiculture, le recyclage et la réparation (notamment avec des imprimantes 3D), les circuits courts, l’entreprenariat social, une crèche, des restaurants (où seraient proposés les produits cultivés sur place) etc. Chaque programme disposerait d’un accès en rez de chaussée.

Les bâtiments comporteraient quatre étages dans la partie Nord mais seulement deux dans la partie Sud afin de ne pas gêner les habitants de la tour Béryl. Un passage piéton serait réservé entre WVF et l’ensemble Galaxie.

Ada 13 est séduite par ce projet réellement innovant et qui associe des partenaires attachants. Cela nous paraît aller dans la direction de la ville que nous souhaitons pour demain.

Projet-AAA-WVF

Le nouveau stade olympique de Tokyo,
« un éléphant blanc » japonais

Lorsque l’architecte irako-britannique Zaha Hadid remporta le concours international pour un nouveau stade olympique de 80.000 places pour les JO de Tokyo de 2020, rien ne présageait que les choses prendraient une telle tournure. Et pour cause, son projet semblait le mieux correspondre aux nouvelles attentes du cahier des charges du CIO pour le stade : une capacité de 80.000 spectateurs, un toit rétractable, mais surtout un stade avec une excellente performance environnementale, réutilisable, et qui s’intègre dans le contexte urbain.

Mais dés la fin 2012, après avoir été accepté, le projet a du faire face à de vives critiques d’architectes (qualifiant le stade de « monstruosité de 80.000 places »), de l’opinion publique et des politiques, à propos de son esthétique et de son coût. Ce mouvement d’opinion pris ayant de plus en plus d’ampleur, le premier ministre Shinzo Abe a ordonné le 17 juillet 2015 l’abandon du projet et a lancé un nouvel appel d’offres.

Les raisons de la contestation du projet,
et de sa remise en cause

Le premier problème qui est apparu assez rapidement est celui du prix. Alors qu’en 2012 le stade devait coûter 946 millions d’euros, le Conseil japonais des sports (JSC) a révélé le 7 juillet 2015 que le stade devrait coûter 1,9 milliard d’euros, bien plus que n’importe quel stade olympique. Ce prix a été justifié par le dirigeant du JSC, Musao Yamazaki, par le fait que seules quelques entreprises peuvent le réaliser. Le cabinet de Zaha Hadid rétorque que cette augmentation ne peut pas découler du design car les matériaux et les techniques utilisés sont connus.

Le coût annoncé, ainsi que l’opacité entourant le projet, ont déplu aux Tokyoïtes, qui y ont vu un nouvel exemple d’échange secret entre politiciens, bureaucrates et businessmans. Ils leur reprochent d’utiliser des moyens très importants pour le stade, alors que les zones détruites par le séisme et le tsunami de mars 2011 doivent encore être reconstruites. De plus, le gouverneur de Tokyo, Yoichi Masuzoe, n’a pas voulu contribuer au financement du stade (à hauteur de 371 millions d’euros) comme l’avait exigé le gouvernement national.

Enfin, les raisons de la contestation sont d’ordre esthétique et urbanistique. En effet, alors que le projet a été sélectionné par un jury présidé par l’architecte Tadao Ando, un collectif de plusieurs architectes, les « Gardiens du Stade national » s’est formé en 2014 pour protester contre « la monstruosité de 80.000 places ». Le qualifiant « de casque de vélo », moquant sa forme sur Internet en parodiant le stade en WC ou en grille-pain. Si les raisons esthétiques et urbanistiques ont largement été utilisées, le fait que l’architecte du stade ne soit pas japonais a aussi bien sûr déplu aux Gardiens du Stade national.

De plus, la destruction du stade national pour construire le stade olympique, son impact environnemental sur le quartier vert des jardins extérieurs du sanctuaire Meiji, ont fortement déplu aux architectes. Et les tokyoïtes, qui utilisent ces espaces comme lieu de promenade sont également montés au créneau. Finalement, l’impact environnemental a été jugé préoccupant à un moment où Tokyo souhaite organiser des JO verts, en contradiction avec les faibles mesures prises par le Japon pour la COP-21.

Et maintenant ?

Des sportifs médaillés comme Yuko Arimori ont critiqué le projet, des manifestations ont été organisées, et même si les partisans du projet continuent à le défendre, que va-t-il se passer ? Le cabinet de Zaha Hadid a fait connaître son agacement et sa profonde déception, mais n’a pas décidé pour le moment d’engager une procédure. Un nouvel appel d’offres a donc été lancé, comme l’a annoncé le ministre des sports Hakubun Shimomura, avec pour objectif de choisir un nouveau projet en janvier 2016, parmi les architectes japonais, et de terminer ce nouveau stade d’ici au printemps 2020.

Malheureusement, cette échéance implique que le Japon ne pourra finalement pas accueillir la coupe du monde de rugby de 2019, et la fédération de rugby a exprimé « sa profonde déception » en attendant des précisions.

Si, comme le rappelle un éditorial du 18 juillet dans le journal de centre gauche Asahi, « la pagaille autour du stade révèle la réalité de la politique japonaise : les gens au pouvoir agissent pour eux en usant de leur influence », ce stade olympique est un autre exemple « d’éléphant blanc ». Ces projets controversés pour des raisons plus ou moins claires, le plus souvent financières, comme le Centre des Congrès de Lyon ou l’EPR de Flamanville. Cependant, si la tendance aux « éléphants blancs » semble à la baisse en France, cet exemple japonais doit rappeler que nous ne sommes pas à l’abri d’un tel imbroglio.

Forestier Arnaud.
Étudiant à l’Institut français de géopolitique

Le Corbusier dans le 13ᵉ arrondissement
La péniche Louise-Catherine (1929-1930)

La péniche Louise-Catherine (1929-1930) - Photographie : J.-F. E.

La péniche Louise-Catherine (1929-1930) – Photographie : J.-F. E.

♠ La péniche a été construite en 1919 pour alimenter Paris en charbon à partir de Rouen. Elle est alors appelée « Liège ». Elle est construite en béton en raison de la pénurie d’acier dans cette période, est longue de 70 m et large de 8 m, et elle pèse 700 tonnes.

♠ Désaffectée après guerre, la péniche est alors transformée en asile flottant, après avoir été rachetée en 1929 par l’Armée du Salut. Elle est baptisée « Louise-Catherine » du nom de Louise-Catherine Breslau, peintre et amie de Madeleine Zillhardt qui a financé le projet et de la princesse Singer de Polignac, mécène de l’Armée du Salut qui impose Le Corbusier, déjà engagé dans le projet de la Cité de refuge. Celui-ci, amateur de cargos, y aménage trois « nefs » où sont installés des dortoirs de 64 places chacun avec autant de casiers de rangement, un réfectoire de 36 places, une cuisine, des sanitaires, deux appartements pour le directeur et pour le marinier, un jardin suspendu. La surélévation du pont permet d’éclairer et de ventiler le corps du navire où sont installés à chaque extrémité les deux dortoirs, séparés par un bloc de service. L’architecte crée des soupentes pour casser les volumes, et il érige 36 poteaux en ciment armé qui portent le toit-terrasse et libèrent les façades de leur fonction porteuses selon un qui principe sera repris dans la maison « Dom-Ino ». Cet aménagement est en effet l’occasion d’expérimenter des théories de Le Corbusier qui seront développées par la suite. On peut noter aussi que les mesures de la péniche sont calées sur le futur Modulor qui servira à déterminer la structure et la taille des unités d’habitation.
La péniche doit accueillir des personnes en difficulté et servir l’été de colonie de vacances. La Louise-Catherine, inaugurée le 1er janvier 1930, connaît plusieurs emplacements sur la Seine : au Pont des Arts, à Saint-Germain-en-Laye puis au Pont d’Austerlitz. Elle est utilisée jusqu’en 1994 où elle est fermée pour des raisons de sécurité, la coque prenant l’eau.

♠ Après quelques années d’incertitudes, la péniche fortement délabrée est finalement revendue par l’Armée du Salut en 2006. L’association Louise-Catherine veut en faire un centre dédié à l’architecture. La restauration en a été confiée à l’agence Acyc. L’objectif de l’association Louise-Catherine, créée pour l’occasion, est de préserver et de faire revivre cette œuvre, emblématique de la modernité du 20e siècle et de « l’Esprit nouveau » et de rendre visible et lisible la péniche depuis les quais, le pont d’Austerlitz, les bateaux-mouches et le métro aérien. La restauration consiste à aménager trois nouvelles nefs en béton et de nouveaux accès, notamment pour les personnes à mobilité réduite. Pendant la durée des travaux, une structure métallique nommée Springtechture, réalisée par l’architecte Shuhei Endo, doit envelopper la péniche. C’est un gigantesque ruban métallique flottant, composé de trois séquences. La restauration est soutenue par la Drac, la Fondation Le Corbusier, la mairie de Paris et celle du 13e. Un appel à projets a été lancé par Ports de Paris désireux d’animer cette partie des berges.
Au moment de l’acquisition un état des lieux a été dressé par Michel Cantal-Dupart, président de l’association Louise-Catherine : examen de la coque pour sauvegarder la barge et identification des éléments d’origine (2 châssis, l’escalier principal, les soupentes, les placards, les poteaux).
La péniche doit devenir non seulement un lieu d’accueil, de rencontres et d’exposition sur l’architecture et sur Le Corbusier mais doit aussi rappeler son histoire.

Cinq patrimoines doivent être mis en valeur :

  • La barge en béton. Elle doit rendre visible la structure du bâtiment et permettre une lecture de l’histoire technique des bateaux en béton, une réflexion sur la rencontre entre construction navale et béton armé.
  • Le nom « Louise-Catherine ». C’est un hommage aux grandes figures des bienfaitrices, de l’Armée du Salut.
  • L’œuvre de Le Corbusier. Il s’agit de remettre en valeur l’aménagement de 1929 en rétablissant la lumière grâce à la restauration des châssis et guillotines, en retrouvant les couleurs d’origine et la perspective des 3 nefs (par enlèvement des ajouts), en restaurant l’inscription Louise-Catherine, le mât, les escaliers et soupentes, les casiers et placards, en réinstallant les cloisons, en terminant le jardin-suspendu jamais achevé.
  • La solidarité 1929-1994. L’histoire des 65 ans d’accueil des « sans-adresse, sans-repos, sans-taudis » doit faire l’objet d’une exposition d’archives de l’Armée du Salut (journaux, photos, films…).
  • Le patrimoine du futur « créer dans le créé » 2013-2023-3033. La Louise-Catherine synthétise les vingt premières années de travail de Le Corbusier selon M. Cantal-Dupart. C’est un point d’appui pour la réflexion, l’étude.

Ce « bateau-savoir » témoignera donc de l’histoire du lieu, sera un lieu d’exposition, de rencontres, d’information, d’éducation. Des partenariats doivent être établis avec des écoles et des universités : chantiers-écoles, formation qualifiante sur « la promotion du fleuve »… Ce sera un lieu culturel consacré à l’architecture fluviale : photos, vidéos, installations, et interventions d’artistes, inventions scénographiques.


Bibliographie

  1. L’asile flottant de l’Armée du Salut 1929-1930. Gilles Ragot, Mathilde Dion, Le Corbusier en France, Le Moniteur, 1997, p. 44.
  2. La Louise-Catherine : la péniche Le Corbusier. Décembre 2008, 20 pages.
  3. Aurélie Jacques, La péniche secrète de Le Corbusier. Inouï. C’est en réalisant cette œuvre que l’architecte a mis au point nombre de ses théories. Le Point, 18 octobre 2012.
  4. « Louise-Catherine » et Le Corbusier sont dans une péniche, Le Monde, 11 avril 2013.
  5. Olivier Flandin, La péniche en béton de Le Corbusier devient un centre sur l’architecture. Le Monde, 23 mai 2013.
  6. La péniche en béton de Le Corbusier transformée en centre d’architecture sur le quai d’Austerlitz. 28 mai 2013.
  7. Christophe Riedel, Péniche Le Corbusier restaurée : automne 2015. Parallèles potentiels, 20 octobre 2014.
  8. Édito, vidéo photos « 1919-1920 », « aujourd’hui », « demain » sur le site de Louise-Catherine SAS.
  9. Michel Cantal-Dupart, Avec Le Corbusier. L’aventure du « Louise-Catherine ». CNRS éditions, 2015.

Communiqué de presse du conseil d’administration de l’association gestionnaire de la dalle des Olympiades, ASL Olympiades, Paris XIIIᵉ

Petite ville de 10 000 habitants et de 3000 logements, équitablement répartis entre le parc privé et le parc social, la dalle des Olympiades est une copropriété privée, contrairement aux dalles publiques du Front de Seine et de La Défense. Espace, privé en droit, elle n’en est pas moins un espace public de fait, comme l’illustre l’intense animation qui y règne. Et plus encore, depuis l’ouverture de la Web School Factory, accueillant sur la dalle 2500 étudiants formés au numérique, à quelques encablures de l’incubateur de start-up de Xavier Niel et du quartier Paris Rive gauche. La présence d’équipements publics, de supermarchés et de restaurants, de même que la vitalité du commerce asiatique, participent à la fréquentation intense de la dalle, qui a d’ailleurs le statut de « voie privée ouverte à la circulation publique ».

Les membres du conseil d’administration de l’ASL Olympiades, association gestionnaire du site, plaident en faveur d’une vision de l’avenir du quartier, partagée avec la Ville. C’est le sens du message qu’ils ont dernièrement adressé à la Maire de Paris, à son adjoint à l’urbanisme, au maire d’arrondissement et à tous les élus du XIIIe. Lors du conseil d’arrondissement du 15 Juin, les élus du XIIIe ont repris à leur compte l’une des propositions formulées, à savoir la réalisation d’un audit financier, visant à évaluer le montant des dépenses occasionnées par l’ouverture au public de la dalle. Le vœu d’engager cet audit a été voté à l’unanimité, majorité et opposition confondues. Au-delà de ce soutien décisif et du consensus politique, le danger d’un vœu pieux ne saurait cependant être écarté, la mairie centrale étant, seule, décisionnaire. Reste donc à transformer l’essai lors du conseil de Paris des 29 et 30 Juin, où doit être voté le montant de la subvention allouée pour 2015. La réalisation de cet audit confié à un tiers s’impose, puisque l’ASL Olympiades conteste l’estimation des dépenses publiques de fonctionnement faite par les services de la Ville et l’occultation des dépenses d’investissement. A défaut de se voir étroitement associée à la conduite de l’audit et au choix de l’expert désigné, gage d’indépendance, elle pourrait se trouver contrainte de mener une contre-expertise sous la pression des habitants. Qu’ils soient propriétaires ou locataires du parc privé et du parc de logement social, tous paient en effet deux fois l’impôt, en s’acquittant d’une part, des charges d’entretien de la dalle et d’autre part, des taxes et impôts locaux.

Pour que « la municipalisation de fait », promue par le maire du XIIIe, devienne une réalité, il faudrait que la Ville subventionne l’intégralité des dépenses occasionnées par l’ouverture au public de la dalle. Or la subvention allouée, d’un montant de 472 000 euros en 2014, n’en couvre que le tiers ! En 2007, elle a même été amputée de 220 000 euros, la Ville ne participant plus aux dépenses de sécurité du site en raison de la création d’un dispositif de « correspondants de nuits ». Est-il concevable que la puissance publique, en l’occurrence l’État secondé par la Ville, se défausse de ses prérogatives en matière de sécurité sur les habitants ? Confiée à une société privée, la surveillance du site absorbe à elle seule la quasi-totalité du montant de la subvention municipale ! Aux charges s’ajoute le coût des travaux de maintenance, liés au vieillissement de l’infrastructure de la dalle, après plus de quarante ans d’existence. Ainsi, la réfection des quatorze kilomètres de canalisation en sous-sol se voit elle aussi laissée à la charge des propriétaires de la dalle, malgré le caractère en grande partie public des travaux. La requalification de tout l’espace public de la dalle serait également à envisager, à l’instar des travaux d’envergure menés au Front de Seine. Seule la Ville de Paris, aux côtés de l’État et de la Région, peut porter pareille ambition urbaine. L’excellente desserte des Olympiades par les transports en commun, l’environnement très porteur du quartier et le potentiel constructif du site ne devraient-ils pas l’inciter à miser sur ce quartier d’avenir à l’échelle du Grand Paris ?

Un non évènement urbanistique

Le projet des tours Duo de Jean Nouvel pour le quartier Masséna-Bruneseau

Le projet de Jean Nouvel à Masséna-Bruneseau : les tours Duo

Des tours jumelles déhanchées, juchées sur un énorme socle de béton enterré sur neuf étages. Le tout fiché dans un invraisemblable nœud d’infrastructures aux portes de Paris, ça ressemble fort… à un non évènement urbanistique. Il fallait trouver preneur de ce site ingrat, en cherchant du côté de la logistique plutôt que du côté du tertiaire de prestige. Pourtant la Semapa a réussi son coup en vendant ce terrain enclavé à des promoteurs, y compris la Caisse des Dépôts du Québec, dont on se demande ce qu’elle vient faire là. Peu importe.

On comprend vite que l’utilité publique doit être recherchée dans la localisation de 6 000 emplois, qui partiront peut-être demain vers d’autres tours, ou dans la « nature » au gré des courants de nomadisme du tertiaire. L’hôtel ne désemplira pas et, pour le reste, la prise de risque financier est privée, ou considérée comme telle, donc il n’y a pas de quoi s’émouvoir.

Pour peu qu’on puisse en juger correctement sur maquette numérique, le niveau zéro du socle des tours ne produit aucun service public et une urbanité limitée à ces fameux espaces privés ouverts au public, pas toujours ouverts. Ce seront de toute façon des zones d’inconfort climatique comme il en existe toujours en pied de tour. À juste titre, les services de l’État déplorent l’absence d’étude aéraulique, mais à quoi bon étudier ce qu’on ne souhaite pas traiter ?

Un nœud d’interconnexion des transports publics justifie selon les promoteurs la concentration d’emplois sur ce site, déconnecté du tissu urbain environnant. On peut y croire mais il vaut mieux voir ça de près. Résumons : aux heures de pointe un tramway presque saturé, des lignes de métro éloignées, une ligne 10 prolongée peut-être en 2030, une ligne de bus T-zen aux capacités limitées. On sait aussi que les transports collectifs parisiens, ne peuvent déjà plus, malgré de constantes modernisations, absorber le trafic des heures de pointe. Et les tours Duo ne sont qu’un début.

L’étude d’impact est un modèle du genre, à la fois parce qu’elle est plutôt bien faite et parce qu’elle obéit à la loi du genre « pavé ». Même si le résumé, très dense, tente de synthétiser les informations pour le grand public, il faudra bien se décider un jour à formuler plus simplement les diagnostics écologiques. Et revenir aux maquettes physiques…

De très gros efforts sont faits pour construire plus écologique : labellisation HQE, recyclage partiel des eaux pluviales, énergies renouvelables, réglementation thermique 2012 (RT2012), verdissement de terrasses, il faut reconnaitre un effort qui va au-delà du green-washing habituel. Même si pour être juste, il faudrait intégrer l’énergie grise nécessaire à la construction de ces mégastructures acier/béton/verre et mettre au bilan global leur improbable durabilité¹.

Le volet paysage de cette étude n’est pas un cadeau… Le paysagiste s’en tire plutôt bien en proposant de multiples points de vue permettant de se faire une idée de l’impact des nouvelles venues sur le paysage urbain. Ce qui fonctionne plutôt bien à grande échelle, du point de vue de l’architecte et du promoteur qui recherchent une visibilité maximale.

Mais dans le contexte de la Zac et plus largement celui du 13e, cette brutale rupture d’échelle ne fait pas sens. Ces tours apporteront leur modernité dans un contexte urbain déjà très marqué par les constructions hautes, mais qu’apportera leur démesure ? La skyline du 13e, incluant la BnF, existe déjà. Elle marque le paysage parisien et les habitants se l’approprient comme patrimoine lié à l’histoire locale. À une échelle plus humaine ?

Ce projet se veut singulier, il est dans toutes ses composantes surdimensionné : un coup de gomme dans le programme et un trait de crayon plus ajusté feraient du bien à tout le monde. Y compris peut-être au promoteur.

Enfin, pour penser plus large, revenons à la fonction de signal que jouent les tours — on dit en langage savant les émergences — dans le paysage parisien et même francilien. Mais là le problème est : quel signal ?
Car si Paris s’entoure de tours, tantôt raides, tantôt déhanchées, tantôt triangulaires, quel message la capitale va-t-elle délivrer à la banlieue ? Cette banlieue qui sera demain l’extension naturelle du Grand Paris.

Au fait, qu’en pensent les Ivryens ?

Emmanuel Leguy


  1. 2014 a été l’année d’un évènement : la destruction à grands frais d’un IGH dans le secteur du Front de Seine.

Les 40 ans des Olympiades retracés sur France Culture

France Culture a diffusé le 9 juillet 2013, dans l’émission d’Emmanuel Laurentin, « La Fabrique de l’Histoire », un documentaire de Séverine Liatard et Séverine Cassar, intitulé Les Olympiades, un village dans la ville.

Cette émission a été réalisée à l’occasion des 40 ans des Olympiades, ensemble immobilier inclus dans le programme de rénovation du secteur Italie qui prévoyait à l’origine de construire 55 tours d’une centaine de mètres, entre Place d’Italie et Porte d’Italie, à l’emplacement de friches industrielles ou en rasant des îlots d’habitat insalubre. Il n’y aura finalement qu’une trentaine de tours, dont huit aux Olympiades, édifiées entre 1970 et 1976 sur une dalle surplombant l’ancienne gare des Gobelins qui a été reconstruite à cette occasion. Michel Holley était l’architecte en chef chargé de réaménager les terrains ferroviaires déclassés, qui a mis en pratique ses théories urbanistiques : regroupement des tours en bouquets différenciés à l’intérieur de chaque îlot, dessin des panneaux de façade, séparation des fonctions par niveaux. L’opération Olympiades relève de l’initiative de promoteurs et d’investisseurs privés. L’obligation qui leur est faite de reloger sur place les anciens habitants explique la parité entre logement public et privé et donc la réelle mixité sociale qui subsiste encore aujourd’hui. Jusqu’à l’arrêt de l’urbanisme vertical décidé en 1974 par  Giscard d’Estaing, les problèmes liés à ce type de rénovation ont été vivement critiqués, notamment par Ada 13 : appétit des banques et des promoteurs, non-relogement des anciens habitants, retard dans la livraison des équipements.

Actuellement l’entretien de la dalle pose problème. La Ville de Paris a financé des travaux de mise aux normes pour la circulation des personnes à mobilité réduite. Pour pallier au vieillissement de la dalle et pour améliorer la performance énergétique, d’autres travaux sont cependant à prévoir. Ils seront à la charge des copropriétaires : il s’agit d’un espace public de fait mais son statut juridique est celui d’un espace privé de droit. À l’extérieur l’image des Olympiades est plutôt négative, mais les habitants sont souvent attachés à leur dalle qui a des atouts : elle est désormais au cœur d’un important pôle d’activité, bien relayé par le réseau de transports, et il attire une nombreuse population. L’exposition de 2013 au Pavillon de l’Arsenal a contribué à réhabiliter cet ensemble qui occupe une place importante dans le quartier et l’arrondissement (3 000 logements).

Au cours de l’émission, l’histoire des lieux a été retracée grâce aux témoignages de Michel Holley, l’architecte en chef des Olympiades et de son adjoint André Martinat, de Françoise Moiroux, historienne de la ville, spécialiste de l’architecture du XXe siècle, commissaire scientifique de l’exposition sur les Olympiades au Pavillon de l’Arsenal.

Des habitants de la première heure qui aiment leur dalle se sont aussi exprimés. Parmi eux, Alain Joubaire, adhérent d’Ada 13, qui travaille depuis de longues années à la sauvegarde et à la mise en valeur de ce site.


Survie des Olympiades :
la mobilisation des habitants

Plan d’aménagement de la Dalle des Olympiades (2012)

Plan d’aménagement de la Dalle des Olympiades
Sources : lettre d’information Ensemble améliorons les Olympiades, nº 7, juillet 2012.

Les élections municipales ont été pour les habitants une occasion d’alerter les pouvoirs publics et l’opinion sur leurs problèmes spécifiques. La dalle est de statut privé mais elle est de fait un espace public. Les propriétaires en paient doublement l’entretien (taxes locales, charges). Le budget annuel est de 7,5 millions d’euros, soit 1,5 million pour l’investissement et 6 millions pour le fonctionnement. Le taux de participation par catégorie a été fixé dès l’origine par l’Association syndicale libre (ASL), gestionnaire de la dalle : 44 % pour les logements sociaux (Paris-Habitat), 36 % pour les propriétaires privés et 20 % pour les bureaux, commerces et équipements. Les copropriétaires des cinq tours de logements privés assurent la charge du surcoût induit par la réglementation sur les immeubles de grande hauteur (25 % du total).

Alors que les salaires stagnent, le montant des charges a augmenté d’environ 20 % en cinq ans. Le coût annuel représente entre 60 et 70 euros par m². En même temps, à Paris, les charges foncières et les taxes d’habitation ont explosé.

La Ville verse une subvention depuis 1977, date à la quelle la dalle et les rues souterraines ont été classées « voies privées ouvertes à la circulation publique ». Dans la première mandature de B. Delanoë plusieurs revalorisations notables sont intervenues, notamment au titre des dépenses de surveillance. En 2007, par contre, le montant en a été baissé en lien avec la mise en place d’un dispositif de correspondants de nuit : elle est passée de 681.000 euros en 2006 à 460.000 euros en 2007 (467.000 euros en 2013). Cette dotation est jugée insuffisante au regard du coût toujours plus élevé des charges communes de gestion et d’entretien (16,5 %) et des charges relevant du domaine public (32,5 %).

Le vieillissement de la dalle nécessite de grands travaux évalués à 20 millions d’euros au début des années 2000 : réfection des canalisations, remplacement d’équipements techniques, réfection de l’étanchéité des sols. Les copropriétaires doivent en assurer seuls le financement. Il faut y ajouter le désamiantage (1,2 millions d’euros pour les immeubles concernés). En plus de ces travaux de réfection, des travaux « d’amélioration du site » ont été jugés nécessaires : démolition-reconstruction de la crèche et de l’école maternelle, reconversion du stadium en gymnase municipal, rénovation des équipements publics. La Ville de Paris a financé intégralement cette rénovation indispensable. Par contre la Ville ne prend en charge que 90 % des frais du réaménagement des accès, entrepris pour la mise aux normes d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite : les 10 % restants (1,2 million d’euros) sont à la charge des copropriétaires. Notons qu’ils auront à payer l’intégralité des travaux de l’accès Baudricourt (55.000 euros) qui ne peut être mis aux normes alors que, de fait, cette rampe se révèle utile en cas (fréquent) de pannes d’ascenseur ou d’escalator.

Il importe de remédier rapidement à ces difficultés financières qui risquent d’entrainer une insolvabilité généralisée des copropriétaires et la dégradation des Olympiades. Déjà la baisse du prix du foncier répercute une désaffection grandissante. Il serait dommage de laisser à l’abandon un espace où habitent 10.000 habitants et où existe une véritable mixité sociale ; il faut retrouver une dynamique de quartier et préserver la qualité de la vie sur la dalle qui est un lieu très animé et très fréquenté, surtout depuis la création des nouvelles stations de la ligne 14 et du tramway. Par contre, l’attractivité exercée par le commerce asiatique joue un rôle moindre depuis l‘interdiction d’ouverture des boutiques le dimanche après-midi, et cela juste après que les manifestations organisées en 2013 pour les quarante ans, et notamment l’exposition du Pavillon de l’Arsenal, aient fait redécouvrir l’architecture de Michel Holley.

Une municipalisation de la dalle pourrait être une solution. Elle a été envisagée en 2001 par la nouvelle municipalité, et exigée en 2005 par les habitants qui souhaitaient « la prise en charge par la Ville des charges communes d’entretien ».
Le rejet de cette demande a été justifié par une étude juridique concluant à l’impossibilité de municipaliser les Olympiades qui sont de caractère privé. Le débat est actuellement relancé. Une association locale, le Groupement de défense des intérêts des copropriétaires et des locataires des Olympiades ou GDI réactive l’action en ce sens. Elle a interpellé les candidats aux municipales, en demandant en plus de la municipalisation l’adoption de mesures contre la montée des charges et taxes, contre l’insécurité et l’insalubrité des lieux. Elle souhaite aussi un bilan de la gouvernance des Olympiades et réclame plus de transparence dans la gestion et une participation plus directe des habitants aux choix budgétaires.

Le collectif Dalle des Olympiades ne voudrait pas que la réouverture du débat sur la municipalisation serve d’alibi pour occulter la faible participation financière de la puissance publique. Dans une Lettre ouverte aux candidats, il demande le triplement de la subvention pour couvrir l’intégralité des dépenses communes d’entretien de la dalle, le financement des travaux liés à la fonction d’espace public de la dalle, la prise en charge des dépenses de sécurité de la dalle qui sont assurées aujourd’hui par les copropriétaires privés. Comme le GDI, le collectif souhaite que les propriétaires des tours soient mieux représentés à l’ASLO, mieux informés et puissent intervenir davantage sur les décisions de l’association gestionnaire, en particulier celles qui pèsent directement sur leurs finances. Pour éviter que la dalle ne devienne une friche commerciale, demande est faite de revenir sur le retrait du label de zone touristique du « quartier chinois » qui a entrainé une forte chute de leur chiffre d’affaires. Enfin le collectif, déplorant l’insuffisance du projet actuel de rénovation de la dalle qui ne permet pas de requalifier l’espace public, souhaite un projet urbain plus vaste permettant de tirer parti du potentiel d’attractivité de la dalle et d’accroître son rayonnement.


  1. Le blog de l’association Groupement de défense des intérêts des copropriétaires et des locataires des Olympiades
  2. La page Facebook du collectif Dalles des Olympiades
  3. Marc Ambroise-Rendu. Les Olympiades : une utopie inachevée et sous perfusion. La Lettre de l’Ada 13. P. 2-3. Numéro 15. Juillet 2013

Réponses d’Europe Écologie les Verts au courrier d’Ada 13 du 27 février 2014

Paris, le 10 mars 2014

Madame, Monsieur,
Comme suite à votre courrier du 27 février posant des questions particulièrement pertinentes, je vous adresse, ci-joint, les réponses que je peux vous apporter.
Celles-ci sont nécessairement succinctes et je reste à votre disposition pour approfondir tel ou tel point que vous souhaitez.
Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, en mes sentiments les meilleurs.
Yves Contassot


Réponses au courrier du 27 février 2014

1. Révision du PLU
Avant toute nouvelle opération de révision générale du PLU, il conviendra de tirer un bilan détaillé de l’actuel PLU et du PADD. En effet ce dernier prévoyait, à tort selon moi, la construction de bureaux en nombre très élevé, la possibilité de dépasser les plafonds de hauteur et, de façon plus positive, l’obligation de réserver une partie des programmes en logements sociaux ou le maintien de commerces.
Afin de favoriser une démarche participative, il faudra repartir des 11 000 propositions formulées par les citoyens et leurs associations et examiner point par point, ce qui a été fait ou non et les conséquences sur les quartiers.
Cela prendra nécessairement beaucoup de temps et devra être organisé de façon très décentralisée. La création de comités locaux de pilotage de révision du PLU ayant comme mission première de tirer le bilan du précédent PLU me parait une nécessité. lls devront être composés de façon pluraliste intégrant les associations locales, les conseils de quartier (sans élu !), des citoyens, etc.

2. Densité
Paris a atteint déjà un niveau très élevé et la priorité n’est pas à son accroissement. À ce stade il convient plutôt d’avoir une approche métropolitaine afin de répartir les différentes fonctions de la ville à ce niveau : habitat, emplois, loisirs, espaces verts, etc.
De plus la création de nouveaux logements à Paris, notamment dans le parc social, s’est traduite par une diminution de la surface moyenne des logements passant de 80 à 60 m² ce qui implique une dégradation des conditions de logement et une densification par logement. Au surplus cela condamne un peu plus les familles à quitter Paris. En l’occurrence il s’agit d’un artefact permettant d’accroître artificiellement le nombre de logements sociaux, l’IAU ayant publié une étude montrant que 50 % des nouveaux logements ont été créés par découpage d’anciens logements.

3. Plan climat
La solution consiste à imposer la rénovation thermique au même titre que l’accessibilité avec une échéance suffisamment longue (environ 15 ans) pour que les propriétaires aient le temps de s’organiser. Cela dit il ne peut s’agit que d’une décision législative mais la ville peut y contribuer en incitant plus fortement les propriétaires. (Cf. mon programme)

4. Logement
À ce stade, il convient de modifier la répartition des programmes prévus sur PRG pour aller vers un rééquilibrage au profit des logements et au détriment des bureaux. De plus il faut impérativement accélérer la transformation de bureaux vides en logements.
Je préconise une réelle mixité des logements créés en établissant un zonage très fin : davantage de logements très sociaux dans le nord du 13e et plus de logements à destination des classe moyennes dans le sud.

5. Logement (suite)
Limiter la hausse des loyers passe par une lutte plus intense contre la spéculation immobilière, cette dernière alimentant la première. À cette fin la Ville pourrait mettre en œuvre la procédure de préemption renforcée dont elle dispose y compris dans le diffus. Toute DIA qui dépasserait un niveau fixé et rendu public se traduirait par la préemption par la ville faute pour le vendeur de vouloir baisser son prix de cession (pratique de Saint-Ouen). Par ailleurs il faut que les « zinzins » reprennent leur programme de construction, création de logements à prix limité afin de faire baisser les prix de référence prévus dans la Loi Alur.

6. Transports
La priorité consiste à améliorer l’existant par la généralisation des horaires en soirée pour tous les bus, assortie d’une augmentation des fréquences qui ne doit pas dépasser 5 min. en journée et 10 min. en heures creuses.
Je préconise également la mise en accessibilité de l’ensemble de la ligne 6 en commençant par les stations aériennes car cela est très facile et peu couteux.
J’ai proposé que le futur Tzen 5 ait pour terminus la Gare d’Austerlitz et non pas le milieu de l’avenue de France. J’ai proposé également que le 83 passe par Denfert-Rochereau et que soit créées des traverses supplémentaires dans certains quartiers.
En la matière la ligne générale est de privilégier les circulations douces et les transports en commun.

7. Environnement
Pour la Petite Ceinture, je me suis prononcé depuis très longtemps pour qu’elle devienne un lieu de promenade pour les piétons tout en préservant sa richesse au plan de la biodiversité. Quelques aménagements tels que des jardins partagés pourraient toutefois y voir le jour.
Pour ce faire il convient que la Ville de Paris ose enfin lancer une procédure d’achat ou de bail emphytéotique sauf si RFF accepte de mettre gratuitement à disposition l’emprise. La mobilisation de la population à cette fin devrait être organisée par la Mairie afin de peser sur RFF et le contraindre à sortir de l’immobilisme.

8. Environnement (suite)
L’installation de bancs en grand nombre figure parmi mes priorités. L’argument selon lequel les bancs seraient source de nuisance n’est pas acceptable au regard du service rendu.

9. Quartiers isolés du 13e
Au plan de la desserte, j’ai indiqué la nécessité de développer les traverses. Cependant je plaide également pour le prolongement de la ligne 5 jusqu’à la mairie de Montrouge ou la Porte d’Orléans pour désenclaver tout le sud de l’arrondissement.
Cependant l’isolement de certains quartiers ne ressortit pas seulement à la question des transports mais plus largement à la question de l’inclusion sociale, culturelle, éducative, environnementale.
Un effort tout particulier doit être fait pour investir massivement dans ces quartiers et ne pas laisser les associations seules face à ces quartiers.

10. Commerces et services
La création et l’action de la Semaest a été positive mais insuffisante. De même les protections du PLU sont utiles sous réserve qu’elles puissent se traduire au plan opérationnel. Or dans ce domaine la question financière l’emporte trop souvent et il faut que les dotations à la Sem soit plus importantes afin de lui donner des moyens d’agir à la hauteur des enjeux et ce, sur tout le territoire parisien.

11. Conseils de quartier
Actuellement les conseils de quartier sont en phase de déclin avec une faible participation des habitants et une main mise un peu trop avérée des élus et de la mairie sur les Conseils. De plus les moyens alloués aux Conseils sont très faibles notamment en matière de communication ou d’investissements. C’est sur tous ces points que les évolutions doivent intervenir : augmentation significative des budgets laissés à la discrétion des Conseils, suppression des élus référents dans les conseils, dotation de moyens d’information conséquents pour pouvoir informer l’ensemble des habitants des réunions, droit d’inscription automatique des vœux des Conseils de quartier lors de la réunion du Conseil d’arrondissement, etc.

12. Accueil santé
Dans mon programme figure la création de maison de santé (conventionnées en secteur 1) afin d’offrir l’accueil auquel les habitants ont droit. De plus la ville devrait soutenir plus activement les centres de soins pour éviter les fermetures. De même nous préconisons l’ouverture d’un centre de médecine chinoise conventionné au sein de La Salpêtrière (bien qu’un embryon existe déjà).

13. Sans domicile fixe
La question des SDF ne saurait se limiter à la question du logement même si cette dernière est cruciale. D’expérience, pour avoir accompagné des SDF dans leur démarche, je sais à quel point la question de l’accompagnement personnalisé est fondamentale pour la réinsertion de personnes désocialisées. Cela passe donc par un renforcement des moyens humains des services sociaux avec comme priorité d’aller sur le terrain au-devant et à la rencontre des SDF. Une fois ces contacts établis il faut encore du temps, hélas, avant que la plupart accepte de déposer une demande de logement. Le passage par des logements passerelles est à cet égard un moyen souvent efficace s’il est doublé d’un accompagnement de proximité.
Cela doit conduire à multiplier les structures d’accueil et les logements sociaux sous toutes leurs formes, tout en développant en parallèle la mobilité résidentielle, seule à même de sortir du goulot d’étranglement actuellement constaté.

14. Associations
Non seulement l’actuelle Maison des associations est trop petite vu la richesse associative du 13e, non seulement il en faut une deuxième, mais il faut aussi permettre aux associations d’avoir leurs propres locaux si elles le souhaitent.
Cela devrait passer par une tarification spécifique des locaux gérés par les bailleurs sociaux et la rupture avec la politique menée actuellement visant à louer systématiquement au prix du marché commercial.
De plus une deuxième maison ne saurait être localisée tout près de la mairie comme cela est envisagé mais au contraire en tenant compte d’une répartition harmonieuse dans le 13e.
On pourrait même à terme avoir d’autres maisons des associations de taille plus modeste dans plusieurs quartiers pour mailler l’ensemble de l’arrondissement.

15. Paris Métropole
EELV a déposé un amendement lors du débat parlementaire pour que les conseillers métropolitains soient élus au suffrage universel direct. Malheureusement ils ont été les seuls à défendre ce point de vue. En conséquence, les conseillers métropolitains seront élus au deuxième voire troisième niveau donc de façon totalement non démocratique.
Pour ce qui concerne la phase de préfiguration il faut attendre la publication du décret fixant la composition de la mission. Pour ma part je plaide pour une représentation des élus à la proportionnelle des résultats des élections et pas seulement en fonction du nombre d’élus au Conseil de Paris.

16. Paris Métropole (suite)
Le risque d’une distance encore plus grande entre les citoyens et les lieux de décision est réel. Cela implique encore plus la déconcentration au sein de la métropole du Grand Paris selon le principe de la subsidiarité. Cela implique que les niveaux infra-métropolitains disposent d’une autonomie budgétaire réelle pour les investissements à leur niveau, budget eux-mêmes subdélégués à des niveaux plus fins (cf. Conseils de quartier). De plus je plaide pour que les décisions concernant un territoire donné ne puisse se prendre qu’avec une majorité qualifiée afin d’éviter l’actuel système de majorité automatique.