Un non évènement urbanistique

Le projet des tours Duo de Jean Nouvel pour le quartier Masséna-Bruneseau

Le projet de Jean Nouvel à Masséna-Bruneseau : les tours Duo

Des tours jumelles déhanchées, juchées sur un énorme socle de béton enterré sur neuf étages. Le tout fiché dans un invraisemblable nœud d’infrastructures aux portes de Paris, ça ressemble fort… à un non évènement urbanistique. Il fallait trouver preneur de ce site ingrat, en cherchant du côté de la logistique plutôt que du côté du tertiaire de prestige. Pourtant la Semapa a réussi son coup en vendant ce terrain enclavé à des promoteurs, y compris la Caisse des Dépôts du Québec, dont on se demande ce qu’elle vient faire là. Peu importe.

On comprend vite que l’utilité publique doit être recherchée dans la localisation de 6 000 emplois, qui partiront peut-être demain vers d’autres tours, ou dans la « nature » au gré des courants de nomadisme du tertiaire. L’hôtel ne désemplira pas et, pour le reste, la prise de risque financier est privée, ou considérée comme telle, donc il n’y a pas de quoi s’émouvoir.

Pour peu qu’on puisse en juger correctement sur maquette numérique, le niveau zéro du socle des tours ne produit aucun service public et une urbanité limitée à ces fameux espaces privés ouverts au public, pas toujours ouverts. Ce seront de toute façon des zones d’inconfort climatique comme il en existe toujours en pied de tour. À juste titre, les services de l’État déplorent l’absence d’étude aéraulique, mais à quoi bon étudier ce qu’on ne souhaite pas traiter ?

Un nœud d’interconnexion des transports publics justifie selon les promoteurs la concentration d’emplois sur ce site, déconnecté du tissu urbain environnant. On peut y croire mais il vaut mieux voir ça de près. Résumons : aux heures de pointe un tramway presque saturé, des lignes de métro éloignées, une ligne 10 prolongée peut-être en 2030, une ligne de bus T-zen aux capacités limitées. On sait aussi que les transports collectifs parisiens, ne peuvent déjà plus, malgré de constantes modernisations, absorber le trafic des heures de pointe. Et les tours Duo ne sont qu’un début.

L’étude d’impact est un modèle du genre, à la fois parce qu’elle est plutôt bien faite et parce qu’elle obéit à la loi du genre « pavé ». Même si le résumé, très dense, tente de synthétiser les informations pour le grand public, il faudra bien se décider un jour à formuler plus simplement les diagnostics écologiques. Et revenir aux maquettes physiques…

De très gros efforts sont faits pour construire plus écologique : labellisation HQE, recyclage partiel des eaux pluviales, énergies renouvelables, réglementation thermique 2012 (RT2012), verdissement de terrasses, il faut reconnaitre un effort qui va au-delà du green-washing habituel. Même si pour être juste, il faudrait intégrer l’énergie grise nécessaire à la construction de ces mégastructures acier/béton/verre et mettre au bilan global leur improbable durabilité¹.

Le volet paysage de cette étude n’est pas un cadeau… Le paysagiste s’en tire plutôt bien en proposant de multiples points de vue permettant de se faire une idée de l’impact des nouvelles venues sur le paysage urbain. Ce qui fonctionne plutôt bien à grande échelle, du point de vue de l’architecte et du promoteur qui recherchent une visibilité maximale.

Mais dans le contexte de la Zac et plus largement celui du 13e, cette brutale rupture d’échelle ne fait pas sens. Ces tours apporteront leur modernité dans un contexte urbain déjà très marqué par les constructions hautes, mais qu’apportera leur démesure ? La skyline du 13e, incluant la BnF, existe déjà. Elle marque le paysage parisien et les habitants se l’approprient comme patrimoine lié à l’histoire locale. À une échelle plus humaine ?

Ce projet se veut singulier, il est dans toutes ses composantes surdimensionné : un coup de gomme dans le programme et un trait de crayon plus ajusté feraient du bien à tout le monde. Y compris peut-être au promoteur.

Enfin, pour penser plus large, revenons à la fonction de signal que jouent les tours — on dit en langage savant les émergences — dans le paysage parisien et même francilien. Mais là le problème est : quel signal ?
Car si Paris s’entoure de tours, tantôt raides, tantôt déhanchées, tantôt triangulaires, quel message la capitale va-t-elle délivrer à la banlieue ? Cette banlieue qui sera demain l’extension naturelle du Grand Paris.

Au fait, qu’en pensent les Ivryens ?

Emmanuel Leguy


  1. 2014 a été l’année d’un évènement : la destruction à grands frais d’un IGH dans le secteur du Front de Seine.

Paris en route vers un budget participatif ?

La Ville de Paris a lancé en 2014 une première expérience de budget participatif sous la forme d’un vote proposé aux parisiens entre le 24 septembre et le 1er octobre 2014 sur 15 projets d’aménagement parisien allant de la mise en place sur les berges de la Seine de sept tipis indiens pour y fêter son anniversaire (400 000 euros) jusqu’à la végétalisation de 40 murs aveugles pour créer un micro climat qui offrirait un abri aux oiseaux et aux mammifères (2 millions d’euros) en passant par la mise en place de deux piscines éphémères de 25 mètres susceptibles d’être réinstallés d’un site à l’autre (8 millions d’euros). Ils ont été 40 000 (environ 3 % des parisiens en âge de se prononcer) à répondre et donc à opérer un classement entre les neufs projets choisis. Comment et quand celle-ci réalisera-t-elle ces projets votés ? Cela reste à préciser.

Cette expérience a utilisé un concept, le budget participatif, qui n’a rien à voir avec cette démarche dès lors que l’on sait que le véritable budget participatif tel qu’il a été conçu à la fin du siècle dernier par la ville de Porto Alegre implique une discussion préalable et une recherche de consensus entre élus et habitants sur la structure du budget lui-même dans ses recettes et ses dépenses, sur ses priorités et enfin sur les projets particuliers de l’année considérée. La proposition faite et le vote qui en est résulté sont donc très éloignés d’une réelle démarche de budget participatif.

La Ville de Paris en était consciente et a voulu utiliser ce terme dès sa première démarche, même si elle n’était pas bonne, pour pouvoir avancer les années suivantes vers un vrai budget participatif. C’est pourquoi en 2015, il sera proposé aux parisiens une démarche un peu plus avancée qui consistera, dans le cadre d’une Charte, à proposer à la Ville leurs projets tant au niveau de l’arrondissement si le maire est volontaire qu’à celui de la ville. Cette Charte, récemment adoptée à l’unanimité par le Conseil de Paris, précise le processus participatif, les modalités du vote, le calendrier ainsi que les conditions relatives à l’information des parisiens sur la mise en œuvre des projets qui auront été retenus.

C’est donc un progrès. Pour bien avancer dans ce nouveau cadre, il serait souhaitable que les parisiens puissent se retrouver au niveau de leur quartier pour échanger sur leurs idées afin de les mutualiser et de construire ensemble ceux qui leur paraîtront les plus intéressants ou utiles. Les conseils de quartier pourraient servir cet objectif.

Mais c’est aussi aux associations locales parisiennes à y contribuer.

Jacques Remond,
le 20 novembre 2014.

Ada 13 :
50 ans à penser treizième

Panneau d’exposition | Une histoire parisienne de la démocratie participative

À l’occasion de son 50e anniversaire, Ada 13 vous propose
L’EXPOSITION
Une histoire
PARISIENNE
de la démocratie participative


Du 20 au 30 octobre 2014 ■ Mairie du treizième ■ Galerie Athéna
Ouverture du lundi au vendredi de 9 heures à 17 heures et le jeudi jusqu’à 19 h 30


Au sommaire de la manifestation

Ada 13 : de 1964 à 2014…
Début des années 1960 : la fondation

Ada 13 et le treizième : 50 ans d’histoire partagée

Histoire populaire du treizième
Terre d’accueil et porte d’entrée de la capitale

Les grandes opérations d’urbanisme depuis 50 ans

Opération Italie XIII
L’apprentissage de l’urbanisme concerté

1960-1970 : la défense du cadre de vie
Contre la rénovation bulldozer

De la tutelle de l’État à une mairie responsable
Ada 13 mobilise la population pour réformer le statut de Paris

Ada 13 et la démocratie participative

Enrichir le débat public

Les transports : un engagement permanent
aux côtés des usagers de la rue et des transports publics

Intrinsèque beauté des tours
« Les Parisiens veulent tout à la fois… Galaxie le leur offre. »

Un arrondissement marqué par la verticalité

La renaissance de la Bièvre à Paris
Évocation historique ou projet environnemental ?

Des projets en débat…
La Métropole du Grand Paris va rebattre les cartes

Relais Accueil : accueillir les jeunes travailleurs
Une aventure poursuivie depuis 50 ans


Événement organisé en partenariat avec
Icade - Mairie de Paris - Mairie du treizième - Ogic - RIVP - Semapa
et l’aimable soutien de Denis Baupin, député de Paris, et de Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État.


Ada 13 et la démocratie participative

Panneau d’exposition | Ada 13 et la démocratie participative

Concertation, du latin certare : combattre.
La concertation ne recherche pas le consensus. Elle privilégie le dialogue et la controverse en amont des décisions pour mieux répondre aux attentes des usagers.

De la concertation permanente pour Paris-Rive gauche…

  • 1991 : recours contentieux intenté par l’association Tam-Tam contre le Plan d’aménagement de Paris-Rive gauche (PRG), 200 hectares le long de la Seine.
  • Automne 1996 : deuxième enquête publique sur le Plan d’aménagement de zone (PAZ) Seine-Rive gauche. Les associations attirent l’attention de la commis­sion d’enquête sur les conditions de consultation de la population.
  • Avril 1997 : mise en place de la concertation permanente de PRG avec des acteurs associatifs qui s’engagent dans la durée auprès des partenaires en charge de l’opération, avec des outils permettant un travail de qualité (voir ci-dessous).
  • Des avancées à la demande des associations : espaces partagés sur les quais de la Seine ; moins de bureaux, plus de logements, des îlots plus ouverts ; maintien et reconversion des bâtiments industriels : les Grands Moulins de Paris, la Sudac, la halle Freyssinet, les Frigos ; révision des plans de circulation…

▶ Les souhaits d’Ada 13 pour la concertation Paris-Rive gauche

  • Une meilleure articulation avec l’information et la consultation des habitants du 13e arrondissement.
  • Plus d’associations impliquées dans la concertation.

… aux conseils de quartier

  • Les conseils de quartier sont obligatoires dans toutes les communes de plus de 80 000 habitants depuis la loi du 27 février 2002.
  • Les conseils de quartier doivent être représentatifs de la diversité de la population, de ses courants de pensée, de ses préoccupations.
  • Les associations peuvent aider à l’émergence de propositions construites en concertation dans les commissions des conseils de quartier. Pour cela, elles doivent dépasser leur rôle traditionnel d’intermédiaire entre leurs adhérents et les décideurs.

▶ Les souhaits d’Ada 13 pour des conseils de quartier plus efficaces

  • Demander aux conseils de quartier leur avis sur :
    – tous les dossiers soumis au vote des conseillers d’arrondissement sur les points concernant le quartier,
    – les orientations budgétaires de l’arrondissement et de la ville.
  • Demander aux conseils de quartier des dossiers argumentés plutôt que des vœux adoptés à l’unanimité.

La concertation ZAC Paris-Rive gauche

Les acteurs

  • La maîtrise d’ouvrage : la mairie de Paris, la Semapa et la mairie d’arrondissement.
  • Les grands partenaires institutionnels : la SNCF, le Port autonome de Paris, l’APHP, la BnF et l’université Paris-7.
  • Les associations : Ada 13 et Tam-Tam (jusqu’en 2013), la Plateforme, des associations d’habitants, de défense du patrimoine, de l’environnement, de promotion des transports en commun, etc.
  • Trois conseils de quartier (CQ) : Austerlitz-Salpêtrière, Bibliothèque – Jeanne-d’Arc, Patay-Masséna.
  • Un garant qui veille à la forme et au fonctionnement de la concertation, et des personnalités qualifiées qui apportent des contributions sur le fond.

Les instances

  • Des réunions plénières.
  • Des groupes de travail géographiques ou thématiques.
  • Un bureau de la concertation qui fixe le calendrier des groupes de travail et les ordres du jour.

Les outils

  • Un local et un chargé de mission, salarié de la Semapa.
  • Participation aux jurys de concours d’architecture et de marchés d’études de définition.
  • Un budget permettant de commander des études alternatives.

Les huit conseils de quartier dans le 13e
(brochure de la mairie, 2002)

  • Le conseil de quartier est ouvert à toute personne dont la présence dans le quartier est régulière. Les jeunes et les résidents étrangers peuvent y participer.
  • Le conseil de quartier vote des vœux, prend des initiatives sur tous les aspects de la vie du quartier. Des propositions collectives y sont élaborées.
  • Le conseil de quartier émet un avis sur les dossiers, en particulier sur ceux qui sont soumis au vote du conseil d’arrondissement et qui intéressent la vie du quartier.
  • Le bureau d’animation fixe l’ordre du jour du conseil de quartier et l’anime.
  • Les habitants qui le souhaitent peuvent participer au sein d’une commission à l’élaboration des orientations budgétaires de l’arrondissement et de la ville.

Le panneau d’exposition Ada 13 et la démocratie participative est disponible au téléchargement au format PDF.


Au sommaire de l’exposition “Une histoire parisienne de la démocratie participative…


Les informations et visuels présents dans cette page peuvent faire l’objet de restrictions de reproduction ou de diffusion en dehors du cadre strict de leur publication sur le blog d’Ada 13. Pour plus d’information, nous vous remercions de prendre contact avec le webmestre par courrier électronique.